Loudness War : stop

Haute définition 24 bits, 32 bits flottant, fréquence d’échantillonnage de 44.1 à 192 kHz,… et alors ? On n’a jamais eu une telle technologie pour reproduire la musique et pourtant cela ne sert à rien si les artistes ou les labels continuent à nous prendre pour des idiots incapables de voir une différence de qualité sonore, de comprendre les subtilités harmoniques, l’aération, la dynamique d’une œuvre.

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Qui d’entre nous n’a pas un jour acheté un album, puis été franchement déçu à l’écoute d’un enregistrement totalement plat, sans aucune nuance ? Tout cela pour ranger le CD au placard en se disant « c’est quand même 17 euros » !

La raison, souvent, est moins à chercher du côté du mixage (il y en a bien sûr) que du mastering, une étape qui consiste à optimiser le mixage de chaque instrument ou voix, à équilibrer les fréquences, à créer l’espace stéréo, tout en préservant la DYNAMIQUE. Car c’est là que toute la richesse peut être détruite, lorsque le mastering se destine à produire un volume sonore maximal, en cédant au marketing de masse, au détriment de la musicalité.

(attention conclusion a la fin)

C’est là toute la logique de la LOUDNESS WAR, ou guerre des volumes. Une tendance qui se confirme pour devenir alarmante.

La logique de la guerre des volumes

Au départ, cette pratique s’est installée pour augmenter l’impact d’un morceau lors de sa diffusion radio ou en ligne (internet et streaming) et avec l’usage des lecteurs dits “nomades” (autoradios, iPod et smartphone). Un single ainsi gonflé paraîtra sonner mieux et plus fort que les autres morceaux, ce qui frappera davantage l’auditeur. Si l’impact est bien réel sur l’instant, laissant croire à un bon son, l’écoute devient vite fatigante et dépourvue d’émotion profonde.

Le plus aberrant est qu’un traitement de compression est généralement déjà appliqué dans ces médias et autres lecteurs. Du coup, autant la musicalité que la dynamique finissent par disparaître complètement avec cette hyper compression, qui produit ce son plat et sans nuances, avec des timbres noyés dans une « purée » sonore et des percussions assourdies.

Une bonne dynamique, au contraire, permet d’aérer l’ensemble musical, apporte une bonne stéréophonie dans l’espace avec une distinction des notes et en respectant les harmoniques.
Si vous pensez que ce problème ne concerne que les personnes ayant un bon système HIFI, nous vous invitons à écouter au casque les petites vidéos explicatives en lien. Elles vous permettront de prendre conscience que « laisser respirer la musique » nous concerne tous.

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Dans quel but?

Alors, pourquoi l’industrie musicale s’entête-t-elle à utiliser ce procédé, dévastateur sur le long terme, et à ainsi transformer une œuvre, peut être majeure, en purée jetable sans réelle valeur ? Car un bon album, sur le long terme, est aussi un album bien enregistré.

images vinyl

On voit mal les Beatles et autres Pink Floyd, précurseurs à leur époque et utilisant la compression à bon escient, se prêter au jeu de massacre actuel.
L’industrie veut-elle nous faire revenir au vinyle ? Il est vrai que de fortes compressions dynamiques sont incompatibles avec ce support, c’est pourquoi les écarts de dynamique sont généralement mieux respectés. Simplement, avec le retour au vinyle, nous perdrions ce que les enregistrements actuels permettent de meilleur, une reproduction extrêmement précise et des plus amples jamais obtenues. Et cette nouvelle qualité audio est tout simplement époustouflante.

copie écran dynamic range
Heureusement pour nous, la course au volume n’affecte pas tous les styles musicaux ni l’intégralité des enregistrements, loin s’en faut. De plus en plus d’auditeurs et d’ingénieurs du son s’organisent également via des sites ou des tutoriels pour dénoncer la course au volume. Un indicateur commence aussi à se répandre : le DR, pour “Dynamic Range”. Le site participatif http://dr.loudness-war.info/ indique, par exemple, la plage dynamique de beaucoup d’albums.

Le DR ne représente, par lui même, un gage de qualité suffisant, ce serait trop simple : un DR peut être bon avec un mixage nul, mais cela permet au moins de s’informer sur la qualité dynamique d’une production.

Quelles solutions?

Quel que soit le support de vente de la musique, on aimerait voir indiqué ce dynamic range. L’affichage systématique du DR ferait prendre conscience à cette frange de l’industrie que nous ne sommes pas insensibles à une telle dégradation des enregistrements.

L’OMS a d’ailleurs lancé une alerte sanitaire à ce sujet : avec tous les sons en permanence poussés au maximum, le tympan n’a pas de possibilité de relâchement, ce qui est pire qu’une écoute forte.

Une solution serait que les albums soient disponibles sous deux formes, l’une pour la radios et l’autre pour la postérité. L’apparition des “studio master 24 bits” laisse penser qu’un tel format de qualité est dans ce cas disponible, mais il faut savoir que le mastering actuel est souvent, hélas, réalisé qu’une seule fois puis appliqué à tous les supports numériques, la haute définition y compris… tout ça pour ranger le fichier au placard en se disant « c’est quand même 19 euros » !